Bio Tryo / Ce que l'on sème : dans les bacs en Septembre 2008

Un partenariat avec Greenpeace

Publié le 28 juillet 2008

Les graines semées, en 1995, autour du feu de camp pyrénéen qui vit Manu, Guizmo et Mali harmoniser leur voix pour la première fois, ont donné des plantes luxuriantes. Le quatuor à la main verte ne s’est pas contenté d’exploiter l’énergie fossile du reggae de ses débuts. Optant pour une créativité renouvelable, Tryo s’est épanoui en s’ouvrant au monde, tout en restant fidèle à ses valeurs originelles d’engagement et de convivialité.

« Ce que l’on sème », leur quatrième album studio, récolte ce qu’ils ont vécu. Le contexte de l’actualité nationale aurait pu piéger le groupe dans l’étroitesse hexagonale. Mais Tryo ne chante pas forcément là où on l’attend. Un titre, « Marcher droit », règle son compte à la désillusion du 6 mai 2007 et à l’ultra-libéralisme du nouveau président, tout en mettant en perspective de vrais enjeux : la valeur du libre-arbitre, le droit à la différence (« Marcher droit avec nos travers / Marcher de travers mais dans nos droits »).

Mais de la même façon que le groupe a choisi de s’impliquer encore plus activement au côté de l’association Greenpeace pour souligner des urgences à l’échelle mondiale, sa musique et ses textes ont voyagé avec la curiosité de globe-trotters.

Moins frontal peut-être que dans « Mamagubida » (1998), « Faut qu’ils s’activent » (2000) et « Grain de sable » (2003), l’engagement de « Ce que l’on sème » sait user de la poésie et des métaphores pour sensibiliser l’auditeur aux soubresauts du monde. Par la voix « rastagénique » de Guizmo, c’est un arbre qui prend la parole dans « Tombé mal » pour interpeller l’homme qui, par la déforestation, se fait encore plus de mal à lui-même qu’à la forêt. Comme souvent dans ce disque, la thématique d’une chanson pousse la musique vers d’autres continents. Ici le chant en dialecte Eton de la Camerounaise Sally Nyolo imprègne le morceau d’animisme africain.

De la même façon, la passion de Manu pour les raggas hypnotiques de la musique indienne a pu illustrer « Arhundati Roy », consacré à la romancière du même nom, célèbre pour son activisme pacifiste et social dans la patrie de Gandhi. Autre horizon, celui de la cause Touareg évoquée dans « Abdallah » au son de la guitare slide de Daniel jamet (ex Mano negra) gorgée de ce blues dont aiment jouer les « hommes bleus ».
Le reggae acoustique reste un vecteur de conviction, de chaleur, de mélodies vocales dont les entremêlements sont particulièrement bien mis en valeur par la production de Dominique Ledudal. Premier single tiré de l’album, « Toi et moi » confronte l’omniprésence de l’information, la dureté des temps et la singularité d’une histoire d’amour, le plaisir fragile de l’instant présent. Pont parfait entre le Tryo d’hier et celui d’aujourd’hui, le morceau fusionne l’évidence des contretemps jamaïcains et le raffinement des arrangements de cordes de Vincent Segal (présent dans quatre autres titres).

Enregistré dans l’isolement reposant d’une vieille et grande maison de Saint-Rémy de Provence, « Ce que l’on sème » résonne aussi de la tendre nostalgie des musiques brésiliennes. Une samba, guidée par les percussions de Pablo Mendez, finit par envahir « Quand les hommes s’ennuient ». La féminité mélancolique d’une bossa chantée par Mali porte idéalement l’histoire de cette femme en quête d’enfant dans « Une saison de trop ». Décoré de l’émouvante trompette d’Ibrahim Malouf, « El dulce de leche » vibre également d’une fibre latine pour évoquer cette chronique intime de l’émigration et du statut de réfugié politique, inspirée du parcours de Daniel, le percussionniste chilien du groupe.

Cette musicalité rayonnante, en phase avec l’humanisme alter mondialiste du quatuor, perdrait de sa vigueur sans la dose nécessaire d’humour et de légèreté. Ska endiablé, boosté par la fanfare des Fils de Teupu, « Jocelyne » et son histoire de cœur « piercé » laisse entrevoir de belles fêtes scéniques. Chez Tryo, c’est aussi « ce que l’on aime ».

TRYO ET GREENPEACE


Adhérents de Greenpeace depuis plusieurs années, Christophe Mali, Guizmo, Manu Eveno et Daniel Bravo ont décidé de s’impliquer plus activement dans l’association écologique. Dans le nouvel album de Tryo dont le livret est en papier éco-responsable (toute la discographie du groupe sera bientôt rééditée sous cette forme) _, on trouvera ainsi un bulletin d’adhésion à Greenpeace
. Dans les mois à venir, le groupe interviendra à d’autres occasions au côté de l’association
.
Rencontre avec Pascal Husting, le directeur de Greenpeace en France.
Qu’attendez-vous du rapprochement de Tryo et de Greenpeace ?
Pascal Husting : Ce rapprochement date déjà de plusieurs années. Le groupe s’est intéressé au combat écologique avant que celui-ci fasse l’unanimité. Tryo et Greenpeace partagent par ailleurs une volonté d’indépendance, artistique d’un côté, politique de l’autre. Face à l’urgence de la situation environnementale, nous espérons que le groupe pourra servir d’accélérateur de conscience, en particulier auprès d’un public jeune, souvent dépolitisé.

Quelles sont aujourd’hui vos priorités ?

Pascal Husting : De l’avis des scientifiques, il nous reste 7 ou 8 ans pour inverser la tendance des dérèglements climatiques dus en particulier aux émissions de CO2. Nous avons lancé une campagne « 100 mois pour sauver la planète ». Il faut pour cela investir massivement dans les énergies renouvelables et sortir des énergies polluantes que sont les énergies fossiles et le nucléaire. Il s’agira aussi de réduire l’énorme fracture énergétique existant entre des pays du Nord qui surconsomment et des pays du Sud où des millions de personnes n’ont pas accès au service énergétique de base.

Votre autre priorité concerne la déforestation ?

Pascal Husting : Notre second projet prioritaire est une tolérance zéro pour la déforestation, surtout dans les trois derniers grands massifs de forêt primaire de l’Amazonie, du Congo et de l’Indonésie. Cette déforestation est à elle seule responsable de 20% des émissions de gaz à effet de serre. Notre but est de sauvegarder les peuples autochtones, de protéger la biodiversité et de réduire les émissions de CO2 de 20%. Nous avons chiffré les investissements nécessaires pour atteindre ce but à 20 milliards de dollars par an, l’équivalent de deux semaines de guerre en Irak.

Quels sont vos moyens d’action ?

Pascal Husting : L’urgence est telle que la somme des changements comportementaux ne suffira pas. Nous ne voulons pas culpabiliser le consommateur ou le citoyen, même si ceux-ci doivent prendre leurs responsabilités. Le plus important est de peser sur les politiques. Les changements les plus importants ne peuvent venir que du corps législatif et dans l’adoption de nouvelles lois. Nous entreprenons des actions de lobbying. Mais nous continuons à prescrire une confrontation plus radicale et physique en cas de crime ou délit environnemental.


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