« D'ici 10-15 ans, il n'y aura même plus de traders humains » Retour sur le 1er Mardi de l'Ingénieur de l'année 2015-2016

Pour son premier Mardi de l'Ingénieur de la saison 2015-2016 organisé le mardi 6 octobre, l'ESME Sudria invitait l'un de ses Anciens, Stéphane Leroy (ESME Sudria promo 1990), pour aborder la place que peuvent occuper les ingénieurs dans le domaine de la finance de marché.

Publié le 08 octobre 2015

Pour son premier Mardi de l'Ingénieur de la saison 2015-2016 organisé le mardi 6 octobre, l'ESME Sudria invitait l'un de ses Anciens, Stéphane Leroy (ESME Sudria promo 1990). Celui qui, aujourd'hui, occupe le poste de directeur des ventes chez S&P Capital IQ, l'un des principaux fournisseurs de données, de recherche et d'analyse multi classes d'actifs, est revenu sur son parcours atypique et sur la place que peuvent occuper les ingénieurs dans le domaine de la finance de marché.

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Véronique Bonnet, directrice générale déléguée de l'ESME Sudria et Stéphane Leroy

Un titre d'ingénieur délivré par l'ESME Sudria ouvre tout un tas de portes, y compris celles auxquelles on ne s'attend peut-être pas. Pour Stéphane Leroy, ce sont celles de la finance qui se sont ouvertes. « Le but du jeu dans la vie, c'est de savoir ce que vous voulez faire et de trouver la bonne réponse et dans mon cas, après un ou deux stages dans des départements R&D, j'ai rapidement vu que la technologie pure n'était pas forcément mon fort, expliquait-il à la centaine d'étudiants venus assister à la conférence. À l'époque, quand j'étais en stage en R&D chez Thomson, j'avais également remarqué que le département commercial et celui de la recherche ne communiquaient pas entre eux : les techniciens ne savaient pas le but de leur travail et les commerciaux ne comprenaient pas les spécificités techniques. En 5e année, j'ai alors décidé de faire un stage en marketing technologique et cela m'a décidé à poursuivre dans ce domaine. » Son diplôme en poche, l'intervenant décide alors de rajouter une ligne à son CV avant de se lancer définitivement dans la vie active. « Après un master marketing à HEC, j'ai commencé comme responsable marketing chez Borland, un éditeur de logiciels, car je voulais synthétiser la technologie pour pouvoir la vendre. Mon avantage, c'est de pouvoir parler le même langage avec les acteurs du R&D. »

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Tête chassée et découverte d'un nouveau monde
Après deux années passées chez Borland, Stéphane Leroy décide de changer de voie et, en pleine dérégulation des télécoms, intègre AT&T France. Alors chargé du marketing et des ventes indirectes sur l'Europe du Sud, il voyage beaucoup et, de par son profil atypique, se fait rapidement repéré par un chasseur de têtes venu le recruter pour le compte d'un grand groupe, NCR Corp, notamment connu pour ses caisses enregistreuses et DAB (distributeurs de billets), puis quelques années plus tard rejoint Radianz, spécialisée dans les services internet à destination des sociétés financières. « Pourquoi je me suis orienté vers la finance ? C'est le hasard. Quand j'étais dans les télécoms, je pensais connaitre ce secteur car mes clients étaient parfois des banques mais la finance est bien plus complexe que cela. Je l'ai découverte véritablement en arrivant dedans. »

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Le C++, le nouveau langage de la finance
Par la suite, en 2006, il lance QuantHouse avec des partenaires de la finance, rachetée six ans plus tard par S&P Capital IQ. Et si QuantHouse a séduit, c'est parce qu'en proposant des solutions de négoce systématiques entièrement informatisées, elle touchait du doigt une vraie tendance de la finance : la place toujours plus importante de l'informatique, des algorithmes et donc des ingénieurs. « La technologie que nous avons développée permet de simuler l'esprit humain, avec un modèle de trading compliqué à développer mais facile à utiliser pour nos clients. Aujourd'hui, les nouveaux traders sont des ingénieurs, des informaticiens qui codent des logiques de trading. Si le monde de la finance vous attire, c'est justement pour vous le moment de vous lancer dans les marchés capitaux. Actuellement, il y a un monde qui s'écroule qui a pour langage commun l'anglais et où le facteur clé des réussites, c'est le relationnel. Désormais, le langage de la finance du 21e siècle sera le C++, même si l'anglais sera important. Le relationnel clé, ce sera avec les API. Et si le métier de broker, de mon point de vue, est en train de mourir, beaucoup d'autres sont en train d'exploser. »

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Les hommes sont aussi des algorithmes
Pour mieux comprendre cette évolution notable et le fait que « le marché de capitaux aura plus que jamais besoin de connaissances en statistiques, mathématiques, informatique et programmation dans les prochaines années », l'ingénieur rappelle les derniers bouleversements qu'ont pu connaître les composantes des marchés de capitaux au fil du temps, soit le buy side (le sous-segment où se trouvent les gestionnaires d'actifs qui conçoivent des portefeuilles d'investissements), le sell side (les brokers, qui sont membres de marché et savent où acheter les actions demandées par les clients) et l'eXchange (où se trouvent les actions). « Dans les années 80, la technologie, c'était zéro et les composantes communiquaient par réseau et uniquement via téléphone. Dans les années 90, c'est l'arrivée de la techno et la quasi-totalité des bourses remplacent les gens de l'eXchange par un serveur. L'informatisation de l'eXchange est un énorme changement : avec ce remplacement surviennent des mésententes, des discontinuités : les acteurs du sell side ne peuvent plus communiquer par téléphone avec l'eXchange mais via un ordinateur. À partir de là, de nombreuses sociétés se sont créées pour monter des terminaux de trading, juste pour donner la possibilité au trader de parler le même langage que celui du serveur. Toujours dans les années 90, il y a eu la création du protocole FIX pour que les terminaux des différentes marques puissent communiquer avec l'eXchange. Dans les 2000, l'informatisation allant, les serveurs ont également remplacé les acteurs du sell side, avec des concepts de rapatriement d'ordres directement émis par le buy side. Du coup, il est fini le temps des humains à tous les étages : seuls ceux du buy side subsistent encore. Et bientôt, d'ici 10-15 ans, il n'y aura même plus de traders humains. Tous les échelons seront informatisés. » Et à croire l'intervenant, ce renouveau technologique ne peut être que positif. « Pour moi, les hommes sont aussi des algorithmes. La seule différence, c'est qu'avec les algorithmes informatiques, c'est qu'on peut remonter toutes les actions et décisions effectuées à n'importe quel moment alors que, si vous dites à un trader de faire une pause aujourd'hui pour lui demander où il en est dans ses opérations et résultats à l'instant T, il sera incapable de vous répondre. »


ESME Sudria


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