Aéronautique et développement durable

Retour sur une partie du colloque organisé par l'IPSA, le 7 décembre dernier à Paris

Publié le 20 décembre 2010

2avionvert.jpg Le fort ralentissement de l'économie mondiale, la crise du transport aérien et la défiance des entreprises américaines vis-à-vis de l'aviation d'affaires ont fragilisé les constructeurs aéronautiques et leurs fournisseurs. L'objet du colloque organisé par l'IPSA le 7 décembre 2010 à Paris était d'évaluer dans quelle mesure cette crise d'une ampleur exceptionnelle a touché les programmes de recherche et développement des industriels orientés vers une aviation plus verte.
Compte-rendu de la table-ronde : « Quelle stratégie en matière de développement durable face à l'évolution économique et financière mondiale ? », animée par Gil Roy, journaliste à « Air et Cosmos » et qui a réuni Philippe Ayoun, sous-directeur de la Direction générale de l'Aviation civile (DGAC), Jean Pierre Casamayou, rédacteur en chef d'« Air et Cosmos » et François de Ryck, directeur d'HBI Consulting.
Pour Gil Roy, la crise financière a fait passer au second plan les objectifs du développement durable affirmés en 2008 dans le cadre du Grenelle de l'Environnement par les acteurs du secteur aéronautique. Les impératifs écologiques sont-ils compatibles avec l'économique ?
Etat des lieux
D'un point de vue financier, les constructeurs d'avions de ligne s'en sortent plutôt bien et subissent peu la crise : Airbus a produit 498 avions l'an dernier. Cela est identique pour Boeing ou pour le constructeur ATR qui a quadruplé sa production en 3 ans. Mais la majorité de ces avions ont été commandés en 2000, bien avant la crise. La croissance prévisionnelle pour 2010 se situe autour de 5 %, avec une légère reprise des commandes. En revanche, l'aviation d'affaires et l'aviation sont plus affectées par la conjoncture économique, morose. Pour Jean-Pierre Casamayou, le moral du secteur est plutôt bon. Les carnets de commande sont bien remplis : 31 000 avions sont à construire dans les années qui arrivent. Mais les prix sont tendus.
2a320.jpgSelon François de Ryck, bien que la reprise du marché se confirme, le modèle économique des équipementiers est en train de changer du fait de la pression sur les prix et les variations du prix du fioul par exemple : Airbus innove avec l'A320neo, à la fois moins gourmand en carburant et plus performant sur l'endurance que l'A320 classique.
Philippe Ayoun se veut rassurant en rappelant que tous les acteurs de l'aviation se sont engagés dans le cadre du Grenelle, et que l'aviation dans le monde ne représente selon le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) que 2 % des émissions des gaz à effet de serre. Il précise que pour chaque engagement, un calendrier était tenu : sur la réduction d'émission de CO2 (Air France par exemple a réalisé des réductions concrètes d'émission) et sur la réduction des nuisances sonores à Orly et Roissy. Seul l'engagement concernant le renouvellement des flottes a pris un certain retard, pour des raisons économiques.
Comment produire durablement à moindre coût ?
Pour Jean-Pierre Casamayou, les cycles du secteur aéronautique étant traditionnellement longs, les nouvelles technologies vertes pour relever le défi écologique ne seront pour la plupart pas accessibles avant 2020 ou 2030. Mais une vraie concurrence existe autour de ces développements, aussi bien entre les gros avionneurs et les nouveaux venus, qu'entre Airbus et Boeing eux-mêmes. Une mondialisation du vert a minima se développe : comment produire durable à moindre coût ? L'A320neo doit entrer en service en 2016 et l'objectif de réduction de 15 % des émissions impose une réduction de 2 % par an dans les prochaines années : pour tenir ce calendrier, il faut selon lui combiner le remplacement des flottes par des avions plus modernes, la consommation réduite de carburants fossiles et les économies de moyens.
2carburantvert.jpgChaque compagnie aérienne possède son propre programme de développement de biocarburants. L'aviation serait derrière le secteur automobile dans le domaine des carburants alternatifs. En effet, il n'existe pas de réglementation en la matière dans le secteur aéronautique. Les procédés de production de carburant à partir de la biomasse demeurent encore très chers. D'autre part, un remplacement des carburants classiques par les biocarburants demanderait une refonte totale de la chaîne de production des moteurs, ce qui serait une révolution très coûteuse.
La place du passager
Un certain nombre de conséquences possibles du développement durable auront une répercussion directe sur l'utilisateur : réduction du rayon d'action des avions, réduction de la vitesse de 20 à 25 % et réduction du confort lié à une optimisation de l'occupation de l'espace plancher. Le comportement des passagers devrait aussi évoluer avec une réduction et une rationalisation de leurs déplacements, en développant de modes alternatifs de rencontres tels que les visioconférences. Pour Philippe Ayoun, le client de transports aériens est en train de changer de comportement progressivement. Les voyages d'affaires ont déjà été réduits à 30 % des déplacements alors qu'ils représentaient plus de la moitié des déplacements en avion. Les vols à bas coût se développent et parallèlement, un gros travail est fait pour augmenter le taux de remplissage des avions.
Réduction des nuisances sonores
2passagers.jpgJean-Pierre Casamayou rappelle que les nuisances sonores sont encadrées par l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (Acnusa) et que les aéroports disposent généralement de médiateurs pour favoriser le dialogue entre les compagnies, les sites et les riverains. Des taxes payées par les compagnies aériennes permettent de financer l'insonorisation. Quant à la gestion des populations autour des aéroports, Philippe Ayoun explique que la politique française en la matière ne concerne que les zones où le volume sonore dépasse les 55 décibels. En Belgique, l'Etat rachète les terrains à proximité des aéroports ou déplace les populations.
Les engagements environnementaux sont en somme très lourds au niveau international et l'évolution des normes s'impose à tous les pays. En ce qui concerne les réglementations nationales et locales, les cas varient. Si l'activité aérienne enregistre une solide croissance, avec le doublement de son volume en 20 ans, les centres de gravité qui changent : si le trafic intérieur a baissé en France par exemple, avec un remplacement partiel par le train, il continue à croître dans le Golfe et en Chine. Et les acteurs industriels sont de plus en plus importants dans les pays émergents (Brésil, Chine ou Inde). Cependant, des accidents et des crises sont encore à envisager dans le secteur dans lequel ils sont récurrents : en moyenne tous les 4 ou 5 ans.

IPSA


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