Les Françaises et l'orgasme : enquête

Enquête IFOP publiée à l'occasion de la « Journée Mondiale de l'Orgasme »

Publié le 17 décembre 2014



Combien de Françaises ont des difficultés à obtenir un orgasme avec leur partenaire ?

Quelles sont les pratiques ou les positions sexuelles les plus à même de les faire jouir ?
Quel impact leur difficultés à jouir a dans leur vie de couple ?

A l'occasion de la « Journée Mondiale de l'Orgasme » organisée le dimanche 21 décembre, le site de webcam CAM4.fr a commandé à l'Ifop une grande enquête auprès des Françaises pour faire le point sur un sujet - les freins et les sources du plaisir féminin - peu abordé dans les grandes enquêtes sur la sexualité alors même qu'il constitue une des questions fondamentales de la sexologie contemporaine.
Il est vrai que depuis l'avènement du sida, la prégnance d'une vision épidémiologique des pratiques sexuelles n'a pas favorisé l'évaluation de l'efficacité des comportements sexuels sous l'angle de ce qui constitue pourtant un des principaux objectifs de la sexualité humaine : la recherche du plaisir et de l'orgasme.

Réalisée auprès d'un échantillon national représentatif d'un millier de Françaises, cette étude met en lumière les difficultés d'accès des femmes à l'orgasme, la diversité des modes d'obtention du plaisir féminin mais aussi la part de fantasmes que suscite la jouissance d'autrui, en particulier chez les hommes.


Les principaux enseignements de l'enquête

A. La dysorgasmie : un problème qui touche de nombreuses femmes et affecte leur vie de couple

En dépit de l'abondante littérature de conseil qui vise à favoriser la jouissance féminine, on observe qu'une forte proportion de Françaises éprouve toujours de grandes difficultés à atteindre l'orgasme avec leur partenaire.

L'absence d'orgasme durant les relations sexuelles est un phénomène important qui touche beaucoup plus la gent féminine que masculine

  • Au cours des douze derniers mois, près de huit Françaises sur dix (79%) sexuellement actives admettent avoir eu des difficultés à jouir, soit sensiblement plus que ce que l'INSERM avait mesuré en 2006 (63%) dans le cadre d'une enquête réalisée par téléphone.

  • Au cours des trois derniers mois, seule une minorité de femmes en couple peut d'ailleurs se targuer d'avoir eu au moins un orgasme par semaine (43%), sachant que parmi elles, seules 6% déclarent avoir joui « tous les jours ou presque ».

  • Une femme sur trois (33%) admet n'avoir pas eu d'orgasme au cours de son dernier rapport sexuel, soit une proportion cinq fois plus forte que leur partenaire (6%).


En effet, si la plupart des femmes interrogées (86%) déclarent que leur partenaire est parvenu à jouir à cette occasion - soit une proportion très proche de celle observée en 1992 (90%) dans le cadre de l'enquête sur les comportements sexuels des Français (ACSF) -, moins des deux tiers (63%) ont joui lors de leur dernière relation sexuelle.

Or, contrairement à certaines idées reçues selon lesquelles on peut avoir une vie de couple parfaitement épanouie sans orgasme, cette dysorgasmie n'est pas sans effet sur la qualité de leur vie sexuelle et sentimentale.

Dans le détail des résultats, on observe en effet que le degré de satisfaction des femmes à l'égard de leur vie sentimentale s'avère étroitement lié à la fréquence à laquelle elles obtiennent un orgasme, passant de 34% chez celles n'en ayant jamais eu à 96% chez celles parvenant à jouir « tous les jours ou presque ».

Ces difficultés à jouir poussent une majorité de femmes à simuler régulièrement l'orgasme avec leur partenaire

  • La vie de couple est également affectée par les stratégies de simulation adoptées par une large de majorité de femmes afin de dissimuler à leur partenaire les troubles de l'orgasme qui les affectent.
    Les résultats de l'enquête révèlent en effet que la simulation est une pratique très largement répandue dans la gent féminine : près des deux tiers des Françaises (63%) admettent avoir déjà feint d'atteindre l'orgasme avec un partenaire au cours de leur vie, sachant que près d'une sur dix admet que cela leur est arrivé « souvent » (9%).

  • Interrogées plus spécifiquement sur ce sujet, les femmes actuellement en couple sont sensiblement moins nombreuses (52%) à admettre à avoir déjà simulé avec leur partenaire actuel (dont 6% « souvent »).


B. L'accès des femmes à l'orgasme semble freiné par une sexualité de couple encore trop «phallocentrée»

Une des causes de ces difficultés à atteindre l'orgasme tient sans doute au fait que les techniques de coït les plus pratiquées ne sont pas toujours celles les plus à même de procurer du plaisir à la gent féminine.

Les pratiques sexuelles les plus fréquentes ne sont pas celles qui favorisent le plus une réaction orgasmique féminine

En effet, la comparaison entre les pratiques les plus fréquentes et celles les plus efficaces - c'est-à-dire celles qui rendent l'orgasme « très facile » au plus grand nombre - révèle que leur prévalence n'est pas corrélée à leur efficience.

  • C'est particulièrement le cas de la pénétration vaginale qui est de loin l'acte sexuel le plus fréquent - 83% des femmes la pratiquent « souvent » - alors qu'elle n'est pas la plus efficace : seules 28% des femmes arrivent « très facilement» à l'orgasme de la sorte, contre 38% dans le cadre d'une pénétration vaginale accompagnée d'une stimulation clitoridienne et 30% par le biais d'un cunnilingus.

  • Or, si la double stimulation (vaginale et clitoridienne) est la pratique permettant au plus grand nombre de Françaises de jouir facilement, sa prévalence dans la population sexuellement active est deux fois moins forte (40%) que la pénétration vaginale stricto senso (83%), tout comme les caresses du sexe féminin avec la main (42%) ou avec la bouche (33%).


Les positions des corps durant l'acte sexuel semblent prendre plus en compte le plaisir féminin même si les plus pratiquées ne sont pas toujours les plus efficaces

Si le missionnaire reste la position la plus pratiquée et la plus efficace, la levrette est la deuxième position la plus répandue alors même qu'elle procure moins facilement d'orgasme aux femmes que des positions où celles-ci sont au-dessus de l'homme.

Les positions où la femme est active semblent faciliter l'orgasme féminin

L'analyse des positions sexuelles en fonction de leur efficacité pour le plaisir féminin révèle que les positions procurant le plus facilement un orgasme féminin sont, en dehors de la très classique position du « missionnaire », celles où la femme est au-dessus de l'homme.

1. Contrairement aux idées reçues, la position du « missionnaire » reste une valeur sûre...

Malgré les critiques sur l'efficacité de cette position de loin la plus répandue en Occident - où elle fut longtemps imposée par l'Eglise comme la position «naturelle» -, le « missionnaire » apparaît comme la position à la fois la plus pratiquée et la plus efficace.

  • Près des trois quarts des femmes l'ayant déjà pratiquée (72%) ont « facilement » des orgasmes de la sorte - un tiers en ayant même « très facilement » (31%) -, soit une proportion bien plus élevée que lorsqu'elles pratiquent l'andromaque (58%), le gaufrier (57%) ou la levrette (53%).

  • Ce fort taux de satisfaction est sans doute lié à la forte prévalence de cette position dans la population sexuellement active (98%).
    Il n'en reste pas moins qu'il oblige à relativiser les critiques de certains sexologues sur les limites techniques de cette position (ex : Masters et Johnson).


2. Mais les positions où la femme joue un rôle actif s'avèrent aussi des plus efficacesais les positions où la femme joue un rôle actif s'avèrent aussi des plus efficaces

Si elles furent longtemps condamnées par la morale religieuse pour leur non-conformité aux rôles sociaux, les positions où la femme est au-dessus de l'homme sont aujourd'hui parmi celles qui favorisent le plus une réaction orgasmique féminine.

  • En effet, l'andromaque (où la femme est assise sur l'homme) et le gaufrier (où la femme est allongée sur l'homme) sont les deux positions, qui après le « missionnaire », facilitent le plus l'orgasme chez les femmes : 58% y arrivant « facilement » avec la première, 57% avec la seconde.

  • Favorisant le plaisir de la femme en lui permettant de décider du rythme des mouvements et de la profondeur de la pénétration, ces positions ne sont pourtant pas les plus pratiquées : 14% des femmes ne s'y sont jamais adonnées, contre 9% pour la levrette et 2% pour le missionnaire.


3. La « levrette » semble quant à elle répondre plus à des fantasmes masculins que féminins

Longtemps proscrite par la morale chrétienne pour son caractère bestial, la position more canino (« à la façon des chiens ») s'impose comme la deuxième position la plus pratiquée alors même qu'elle n'est pas celle qui facilite le plus l'orgasme féminin.

  • Chargées de fantasmes par sa connotation "animale" très prononcée, cette position où la pénétration se fait par l'arrière est en effet la plus pratiquée après le missionnaire : 91% des femmes initiées sexuellement s'y étant déjà adonnées.

  • La levrette n'arrive pourtant qu'au 4ème rang en termes d'efficacité (53%), derrière le missionnaire (72%), l'andromaque (58%) ou le gaufrier (57%).
    Cet écart entre sa prévalence et son efficience tend à renforcer l'idée selon laquelle elle répondrait plus à des fantasmes masculins que féminins.




Pour plus d'informations

Les résultats de cette enquête sont consultables en http://www.ifop.fr/?option=com_publication&type=poll&id=2886




Le clitoris, la clé de l'orgasme féminin ?


Le clitoris, la clé de l'orgasme féminin ?


L'évaluation de l'efficacité des pratiques les plus fréquentes auprès de cet échantillon de 1 000 Françaises nous permet de tirer au moins trois enseignements :

1. La pénétration vaginale reste le moyen d'accès à l'orgasme le plus répandu...

La pénétration vaginale au sens strict - c'est-à-dire sans autre forme de stimulation - étant la forme de coït la plus fréquente (94% des femmes initiées sexuellement la pratiquent "assez régulièrement"), c'est par son biais que le plus de Françaises ont déjà joui au cours de leur vie : 94% des femmes s'y étant déjà adonnées ont obtenu un orgasme de la sorte, contre 88% en se masturbant elles-mêmes, 87% en se faisant lécher le sexe par leur partenaire et 61% en se faisant sodomiser.
Toutefois, ce n'est pas parce que cette forme de pénétration a permis à un grand nombre de femmes de jouir au cours de leur vie qu'elle est la pratique la plus efficace.

2. Mais la technique la plus efficace consiste à stimuler à la fois le vagin et le clitoris

En effet, en analysant plus finement les résultats, on observe que la proportion de Françaises ayant aisément un orgasme vaginal est beaucoup plus réduite : seules sept femmes sur dix (70%) jouissent "facilement" lors d'une simple pénétration vaginale alors que près de huit sur dix (78%) y arrivent "facilement" lorsque leur partenaire les pénètre vaginalement tout en leur caressant le clitoris, soit une proportion plus forte que lorsqu'il leur prodigue des caresses manuelles (71%) ou buccogénitales (65%).
Pratique beaucoup plus occasionnelle, la sodomie apparaît quant à elle comme un moyen d'accès difficile à l'orgasme : seule une femme sur quatre jouit aisément de la sorte (26%), un tiers (35%) y arrivant difficilement et 39% jamais.

3. La stimulation clitoridienne n'en reste pas moins un gage d'efficacité

Mettant en lumière la complémentarité des stimulations clitoridienne et vaginale dans le plaisir féminin, ces résultats permettent donc de relativiser l'opposition classique et désormais désuète entre orgasme vaginal et clitoridien.
Il est toutefois important de relever que les pratiques les plus efficaces - c'est-à-dire celles qui rendent l'orgasme « très facile » - impliquent toutes une forme de stimulation du clitoris, que ce soit dans le cadre d'une pénétration vaginale (38%), d'une auto-stimulation (35%) ou d'un cunnilingus (30%).
A titre de comparaison, la pénétration vaginale au sens strict ne permet qu'à une femme sur quatre (28%) d'obtenir « très facilement » un orgasme.




Le point de vue de l'Ifop



Le point de vue de l’Ifop

Si une large partie de la gent féminine souffre assez régulièrement d’anorgasmie (absence d’orgasme), ce n'est pas seulement en raison d’un manque d’expérience personnelle, d’une vie sexuelle peu intense ou de conditions physiques ou psychologiques (ex : stress, surpoids, relation instable…) défavorables à la production d’orgasme chez la femme.
Les résultats de cette enquête nous montrent aussi que la sexualité de couple n’intègre pas encore suffisamment les techniques leur permettant le plus facilement de jouir.

En effet, si la diversification du répertoire sexuel est une réalité à laquelle n’est sans doute pas étranger l’intérêt porté aux pratiques et aux positions sexuelles par les sexologues, les psychologues ou la presse féminine, la comparaison entre les techniques les plus fréquentes et celles les plus efficaces montre que leur prévalence n’est pas toujours corrélée à leur efficience.
Certes, nombre de Françaises parviennent à jouir sans stimulation clitoridienne ou dans des positions où l’homme est actif et la femme passive (ex : missionnaire, levrette, charrette,…).
Mais on observe qu’elles sont souvent pratiquées beaucoup plus régulièrement que les techniques procurant le plus facilement un orgasme féminin.

L’accès des femmes à l’orgasme semble ainsi freiné par une sexualité de couple encore trop « phallocentrée » ou quelque peu réticente à une « inversion » des rôles.
Ce constat fait ainsi écho à certaines thèses selon lesquelles « les positions adoptées s'inscrivent souvent dans des jeux mettant en scène une domination plus qu’une communication équilibrée » [1] entre les sexes, les scripts intrapsychiques (fantasmes) des hommes n’étant pas toujours ajustés à des scénarios impliquant une certaine passivité masculine durant l’acte sexuel.

François Kraus, directeur d'Etudes à l’Ifop


Fiche technique

Etude Ifop pour CAM4 réalisée par Internet du 25 au 27 novembre 2014 auprès d’un échantillon de 1 006 femmes, représentatif de la population féminine âgée de 18 ans et plus résidant en France métropolitain.
La représentativité de l’échantillon a été assurée par la méthode des quotas (âge, profession de la personne interrogée, état matrimonial légal, statut marital) après stratification par région et catégorie d’agglomération.

Précision sur la méthode d'administration utilisée : en raison du caractère intime du sujet abordé, l’Ifop a fait le choix d’une méthode auto-administrée par ordinateur.
Celle-ci permet de lever le biais qu’implique la présence d’un enquêteur et de libérer la parole des personnes qui n’auraient pas souhaité aborder certains sujets devant un enquêteur ou en présence d’une personne du ménage si l’entretien se déroulait devant un tiers.